Oui, quand on aime bien, on aime pour toujours : 
Non pas, peut-être, avec cette ardeur qui dévore, 
Et qui consumerait la vie en quelques jours ; 
Mais d'une amour plus tendre et plus profonde encore, 
Qui sans cesse s'accroît avec l'intimité, 
Et qui donne la main à sa sœur l'amitié.

Quand cette amour nouvelle embellit l'existence 
On sent moins vivement les tourments de l'absence, 
Mais près de l'objet adoré 
On n'a pas moins de jouissance, 
Car des désirs fougueux la vive impatience 
N'étouffe plus alors, dans le cœur égaré, 
Le bonheur sans égal d'un amour épuré. 
La délicate confiance 
Remplace le soupçon jaloux ; 
On est sûr que nulle puissance 
Me peut plus nous ravir le bien qui nous est doux. 
L'âme n'est plus sans relâche hantée 
De la personne souhaitée ; 
Mais sans cesser de l'adorer 
Elle peut encore admirer 
La poésie et la nature, 
Et la musique et la peinture, 
Et sans rien perdre enfin des tendresses du cœur, 
Par les jeux de l'esprit augmenter son bonheur.
Pierre Grolier, Les ballades et romances (1875)
Street art, Paris 20, photo Saravigotte

Street art, Paris 20, photo Saravigotte

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